[Nouveauté] La parole enveloppée de silence

Simon Hantaï
En deça, le silence sourd des profondeurs océaniques, le silence minéral, végétal et animal ; le silence tremblant de mon propre corps, de mon voir, de mon toucher, de mon goûter, de mon sentir, le silence de ma chair sentante, de ma vie vivante ; le silence des amants. Silence du balbutiement. Silence matriciel de l’homme.
Au delà, le silence des sommets enneigés, le silence des étoiles, la mélodie inaudible de leurs révolutions, le silence de la Parole inouïe de Dieu, le silence du chœur trinitaire ; le silence des amants et de leur chansons. Silence de l’abaissement. Silence destinal de l’homme.
Au milieu, l’homme osant un mot en réponse aux silences. Avançant sa parole comme on avance son pas sur un lac gelé.
Le mot empruntant sa matière à l’en-deça et son idée à l’au-delà veut unir à l’homme la terre et le ciel. Et pourtant le mot de l’homme, trop lourd pour le ciel, trop léger pour la terre, a déjà brisé les deux silences. L’homme est seul dans sa parole, il lui faut un frère.
La poésie est ainsi le propre de l’homme. Le poète ne peut se taire, mais ne parvient pas non plus à parler. Il cherche sans fin le premier mot et soudain entend la nature le lui adresser, entend Dieu le lui révéler. Le silence s’est fait Verbe, le Verbe s’est fait chair. Le silence s’est fait frère, frère bavard, poème.
C’est pour faire entrer ces silences dans nos Cahiers que nous y publierons dorénavant tous les samedi une page de poésie.
Benoît
Une réponse à “[Nouveauté] La parole enveloppée de silence”
[…] soit toujours sur la pointe des pieds que l’on vienne le troubler d’un billet. Y glisser comme une parole, enveloppée de […]